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Christophe - histoire d'un fromager

Natif d’Alsace, dernier d’une fratrie de 6 enfants, fils d’agriculteurs, Comment en être arrivé à cette belle aventure au sein du GAEC des Hounts au cœur des coteaux du Comminges en Occitanie.

C’est dans le petit village de Dossenheim-kochersberg, à 20kms de Strasbourg, que j’ai vécu une enfance de « rural ». Dernier d’une grande fratrie, mes parents agriculteurs, ont connu l’embellie d’après-guerre. Sur la ferme familiale, nous produisions, du lait de vache, des betteraves, du houblon et du tabac. Cette petite exploitation suffisait à nourrir la famille, pas trop de dépenses alimentaires car nous étions en autonomie, on se débrouillait. Les techniques agricoles évoluaient vite, grâce à la chimie et à la volonté politique qui souhaitait faire de la France un pays souverain de son alimentation.

 

Mais voilà, né dans les années 70, les inflations successives (13% chaque année en France) la crise pétrolière ont eu raison de cette vie paisible. Au début des années 80, les mots à la mode étaient « rigueur et austérité », quelle chance pour mes frères et sœurs plus âgés qui y ont échappé alors que moi je rentrais à l’école primaire. Il n’était plus question de nouveaux vêtements pour la rentrée mais de recyclage, plus question de partir en vacances avec la tata fonctionnaire sans enfant mais d’apporter son tribut à l’effort familial.

C’est ainsi que ma vie fut rythmée par les saisons, et les différents chantiers de la ferme (de décembre à mars : tri du tabac séché ; de mars à juillet : chantiers fourragers pour les animaux ; de juillet-août : chantier tabac + fourrages ; septembre : houblon ; octobre-novembre : betteraves ; et bien entendu toute l’année la traite).

 

C’est vers l’âge de 13 ans que je pris la première fois l’initiative de prendre en main le chantier d’été, pendant que mes parents, nouvellement soumis aux règles des quotas laitiers, s’occupaient de la ferme. Un défi dont je me suis enquis jusqu’à ma majorité, qui marquait aussi la fin de ce chantier à la ferme. Le choix m’a alors été proposé, puisqu’on considérait la ferme trop petite pour que mon frère ainé et moi y œuvrions ensemble, de faire des études ou de suivre une voie de séminariste.

 

C’est donc vers des études de pharmacie que je m’orientais, dans le même temps je découvrais la fabrication du fromage dans une ferme auberge, où je passais mes week-end pour financer mes études. Mes études achevées sans conviction, je n’ai pas attendu pour réorienter ma future carrière et ai proposé à l’aubergiste de me mettre à ses services, en fromagerie. À ce stade le fromage devint une passion, elle aurait pu me croiser aussi sur la voie séminariste, et je serais certainement en train de fabriquer du « chaussée aux moines » dans un monastère.

Chemin faisant, c’est le hasard d’un séjour dans le Comminges qui me fit découvrir le Gaec des Hounts. Et là encore, un évènement anodin, mais qui a son importance dans ma vie d’aujourd’hui s’est produit. En effet, l’image de ma fille cadette en train de prendre le sein de sa mère a fait fondre la maitresse des lieux, qui du coup nous assura la visite de la ferme alors que ce n’était pas le jour de la visite. Dans ce temps d’échange nos chemins se sont croisés et six mois après, nous tracions ensemble le même chemin, c’était en 2002.

 

Je retrouvais dès lors l’agriculture, qui m’avait été refusée, alors même que mon frère avait décidé de ne pas s’y investir. Il m’aura fallu 5 bonnes années avant que ce ne soit moi qui dessine, trace le chemin du Gaec des Hounts avec mes associés. 20 ans après je vous retrace cette histoire, après des joies, des péripéties nombreuses, nous sommes en train d’écrire une nouvelle histoire sur un chemin sinueux, pentu mais passionnant et rempli de sens. Je viens, comme tous, d’avoir 2 ans de plus à mettre sur ma carrière. Ces prochaines années, avec les nouvelles technologies, vous pourrez les suivre tel un feuilleton. L’énergie est toujours là, des idées, des envies plein la tête. Mais il sera malgré tout aussi bientôt temps de transmettre, peut-être par hasard, à une nouvelle force vive, qui pourra s’épanouir dans un environnement rempli de sens et tracer son chemin, sa route ici.

 

Christophe roos-oberlé

Associé du Gaec des Hounts